Intoxication par des champignons

TOXICOLOGIE
01/05/2019
Introduction

Les intoxications par les champignons sont isolées ou collectives. Elles sont habituellement d’autant plus graves que les signes apparaissent tard. La transmission d’une photo a tout son intérêt pour contribuer à identifier le champignon.

ARM
2. déterminer le niveau de priorité de l'appel initial

P1 : si détresse vitale.

P2 : en général.

3. chercher à savoir

Nombre de personnes concernées, signes de détresse vitale.

4. conseiller en attendant la régulation médicale et l'arrivée des secours

(sans objet).

5. adapter la décision si l’appel ne peut être régulé immédiatement

Envoi d’un premier secours professionnel notamment en cas de détresse vitale ou si plusieurs personnes sont atteintes.

Médecin régulateur
Régulation
1. éléments d’analyse et critères de gravité

- en cas de manifestations collectives, éliminer une intoxication au CO.

- délai des symptômes depuis la prise du repas : moins de 6 heures (généralement intoxication bénigne de bon pronostic) ou plus de 6 heures (intoxication retardée, de plus mauvais pronostic, par des amanites, cortinaires ou lépiotes).

- terrain majorant le risque : enfant, personne âgée.

- signes cliniques : mydriase ou myosis, douleurs abdominales, diarrhée cholériforme, vomissements, hallucinations…

- faire si possible une conférence à trois avec le Centre Antipoison pour une meilleure évaluation : description du champignon (taille, couleur, collerette, pied…), intérêt de la transmission d’une photo.

2. déterminer le niveau d’urgence

R1 : en cas de signes cliniques retardés ou sévères.

R2 : envoi d’une ambulance ou par leurs propres moyens pour accueil dans un SU dans les autres cas.

3. conseils médicaux

• En attendant l’arrivée des secours : récupérer les restes de champignons cuisinés et les épluchures éventuelles.

• En l’absence de nécessité d’envoi des secours : rappel du 15 en cas de modification ou d’aggravation.

4. niveau de soins attendu et bilan par le premier effecteur

Compléter et valider les critères sémiologiques téléphoniques, mesurer les paramètres vitaux.

5. mise en condition et bilan par le SMUR

Enquête étiologique, traitement symptomatique.

Orientation du patient

• réanimation si nécessaire

• SU qui devra contacter le Centre Antipoison.

Suivi de la régulation médicale

En fonction du risque collectif ou non.

Adaptation de la décision
Aide au raisonnement

En fonction des éléments cliniques et anamnestiques recueillis et des avis spécialisés (Centre Antipoison, pharmacien de la commune…).

Syndromes toxiques par ingestion de champignons : 

1. Syndrome résinoïdien : symptomatologie essentiellement digestive précoce (pendant le repas et jusqu’à 2 ou 3h après) : douleurs abdominales, nausées, vomissements et diarrhée. De très nombreuses espèces sont irritantes au niveau gastro-intestinal : bolet Satan, clavaire jolie, lactaires, pleurote de l’olivier, tricholome tigré, hébélomes ou champignons comestibles mal conservés. 

2. Syndrome sudorien ou cholinergique ou muscarinique : essentiellement sécrétoire exocrine précoce : hypersécrétion généralisée avec rhinorrhée, larmoiement, hypersalivation, hypersudation, douleurs abdominales, diarrhée, vomissements et encombrement bronchique. Les champignons en cause sont principalement les clitocybes et les inocybes. Le traitement repose sur l’atropine.

3. Syndrome panthérinien : essentiellement d’expression neuropsychique précoce : troubles de l’humeur, excitation, désorientation, ébriété avec mydriase, céphalées, pouvant évoluer vers des hallucinations, un délire, des convulsions et un coma. Les champignons en cause sont l’amanite panthère, l’amanite tue-mouche, l’amanite épaisse et l’amanite rougissante.

4. Syndrome psylocybien ou narcotinien : l’intoxication est le plus souvent volontaire et la symptomatologie très précoce (quelques dizaines de minutes) se rapproche de celle du LSD : ébriété, hallucinations visuelles, agitation, anxiété et risque de raptus (qui en fait le pronostic). Les champignons consommés crus ou séchés sont les plitocybes, les panaeolus, des gymopiles, pluctus et certains inocybes.

5. Syndrome coprinien : symptomatologie essentiellement vasomotrice par effet antabuse lorsqu’il y a exposition à de l’éthanol alimentaire ou percutané : vasodilatation intense avec érythrose faciale et de la partie supérieure du tronc, bouffées de chaleur, nausées, malaise, tachycardie, hypotension artérielle pouvant aller jusqu’à la lipothymie ou au collapsus. Les champignons en cause sont le coprin noir d’encre, le clitocybe à pied en massue et la pholiote écailleuse.

6. Syndrome orénalline ou cortinarien : symptomatologie essentiellement rénale retardée de quelques jours à quelques semaines : petits troubles digestifs initiaux, puis cytolyse hépatique modérée, lombalgies et insuffisance rénale aiguë avec néphropathie tubulo-interstitielle risquant d’évoluer vers une insuffisance rénale chronique. Les champignons responsables sont des cortinaires. Le traitement est symptomatique et l’hémodialyse parfois nécessaire. 

7. Syndrome proximien : symptomatologie essentiellement rénale environ 10h après l’absorption : troubles digestifs pouvant être importants suivis d’une cytolyse hépatique modérée et d’une insuffisance rénale aiguë 2 à 4 jours suivant le repas, d’évolution favorable. Ce syndrome est dû à Amanita proxima.

8. Syndrome phalloïdien : symptomatologie retardée essentiellement hépatique apparaissant entre le 2ème et le 5ème jour : gastro-entérite brutale, aiguë et intense, 6 à 48h après le repas, suivie d’une cytolyse hépatique sévère puis d’une insuffisance hépatocellulaire pouvant être mortelle. Les champignons en cause sont l’amanite phalloïde, l’amanite printanière, l’amanite vireuse, des lépiotes ou des galères.

9. Syndrome gyromitrien ou helvellien : atteinte hépatique habituellement de bon pronostic, de délai variable, succédant à des troubles digestifs et parfois, des convulsions. Les malades déficitaires en G6PD peuvent avoir une hémolyse. Les champignons en cause sont des ascolycètes, gyromitres et helvelles.

10. Syndrome paxillien : symptomatologie d’expression essentiellement hémolytique, quelques heures après l’absorption : troubles digestifs puis anémie hémolytique grave. Les champignons en cause sont le paxille enroulé, l’amanite rougissante, épaisse, les gyromitres et les helvelles.

11. Syndrome acromélalgien : acrosyndrome douloureux des mains et des pieds, isolé, apparaissant 24h après le repas et pouvant durer plusieurs mois, dû à Clitocybe amoenolens et à Clitocybe acromelalga.

12. Rabdomyolyse aiguë par la consommation excessive de Tricholoma equestre réputé comestible (bidaou dans le sud-ouest) pouvant évoluer vers la mort par nécrose musculaire striée généralisée.